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Antoine Bello, Les Falsificateurs

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Lorsque Sliv accepte d’intégrer le CFR, il est loin d’imaginer qu’il s’agit d’une organisation secrète internationale qui a noyauté jusqu’à la Banque Mondiale, et dont l’activité est de falsifier l’information. Ses milliers d’agents inventent sans relâche des scenarii avant de modifier les sources existantes ou d’en inventer de nouvelles. De nombreux faits s’avèrent être le fruit de l’imagination du CFR : la première chienne Laïka envoyée dans l’espace, la disgrâce de Cortés auprès de Charles Quint du fait qu’il n’était pas baptisé, les propriétés étonnantes d’absorption du CO2 par une forêt en passe d’être rasée, etc.

Fasciné par son activité dans l’ombre et par le pouvoir qui lui est octroyé, puisque ses dossiers pèsent sur l’opinion et les relations internationales, Sliv est cependant amené à faire face aux conséquences de son engagement : jusqu’où le CFR va-t-il aller pour protéger le secret de son existence ? et surtout, quelle est sa finalité ?

Une histoire incroyablement ficelée, un suspense bien mené, une écriture élégante, ce roman est un bijou qui se lit d’une traite. Soulevant les questions de la tentation de modifier le cours de l’histoire et de la fiabilité de l’information, il crédibilise le mensonge à grande échelle. Attention, effets secondaires : rend paranoïaque ! Seule ombre au tableau : les réponses sont remises à un éventuel second tome…

Gomorra : Roberto Saviano raconte la mafia napolitaine

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Roberto Saviano - Gomorra - dans l'empire de la Camorra

Elles ont engendré plus de morts que n’importe quelle autre organisation terroriste: plus de 10000 en 30 ans.  Cumulé, le chiffre d’affaire des 3 grandes mafias italiennes ( Ndrangheta, Camorra et Cosa Nostra) est estimé à plus de 100 milliards d’euros par an.

Dans son enquète appellée Gomorra, Roberto Saviano nous emmène au coeur des cités napolitaines, fiefs de la Camorra. Nous le suivons dans son terrible parcours : du port de Naple, point d’entrée en Europe de la très grande majorité des contrefaçons en provenance de l’Asie en passant par les cités décimées par la drogue et les armes, puis par les ateliers clandestins producteurs de haute couture pour découvrir finalement avec stupeur la mainmise des mafias sur le traitement et le recyclage (qui n’ont pas lieu) des déchets.

Dans son ouvrage, Roberto Saviano décrit avec précision les mécanismes de la mafia italienne, comment les cités noyautées n’attendent plus grand chose de l’Etat ou de la ville mais tout de la mafia. La fascination des jeunes.

Roberto Saviano

Les systèmes de surveillance par ces jeunes justement. La vie des familles. Les règlements de comptes. Les caches des « parrains ». Les magouilles et les mécanismes financiers déments. La folie de ce monde gangréné et sans valeurs. Edifiant, Gomorra fait peur parce qu’il sonne vrai, parce qu’on voudrait que ce ne soit qu’un film, ou un roman policier. A lire, ne serait-ce que pour saluer le courage de son auteur !

Gomorra a été récemment adapté au grand écran: le film est traité différemment, il insiste surtout sur la description réaliste de « tranches de vie » du monde de la camorra, sur l’absurdité, sur l’horreur et la mort. Complémentaire, le film est tout aussi intéressant, il apporte le coté visuel, concret et réel au livre qui tient plus un rôle de document d’enquète.

Chuck Palahniuk, Choke

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Description commentée :

Choke est la troisième arme de destruction massive lâchée en 2001 par cet ovni de la littérature américaine.

Révélé au monde entier par le succès du dérangeant fight club, Palahniuk excelle dans ce nouveau genre de roman qui fascine presque autant qu’il peut dégoûter.

Corrosif, lubrique, venimeux, provoquant, déjanté, les adjectifs ne manquent pas pour décrire le style de l’auteur qui nous dépeint la quête d’identité de son principal protagoniste: Victor Mancini.

Victor, est un médecin nymphomane qui cherche à découvrir ses origines au chevet de celle qu’il croit être sa mère mourante. Victor a pour passe-temps favori de faire semblant de s’étouffer dans des restaurants afin d’être « sauvé » par des bienfaiteurs généreux. Victor est convaincu par Paige Marschall, une jeune médecin débridée, qu’il est le nouveau christ. Victor a un meilleur ami, Denny, qui, obsédé par les pierres, commence à construire sans permis une immense bâtisse…

Choke est un voyage au cœur de la folie. Chaque personnage est guidé par sa propre névrose obsessionnelle jusqu’au narrateur lui-même qui plaque, un à un, ses tics d’expression.

L’habileté suprême du père Chuck nous conduit pourtant  même à douter, au moment de refermer ce roman effrayant: Qui de ces « egos pensants » est vraiment fou ou clairvoyant?

Pour finir et en un mot, Choke est un livre d’une très grande originalité mais à déconseiller fortement aux âmes sensibles et puritaines.

Vernor Vinge, Un feu sur l’abime (A Fire Upon The Deep)

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Une expédition découvre un trésor dans un lieu reculé de la galaxie: un mine de programmes inconnus issus d’une Archive d’une civilisation disparue. En explorant ces programmes, les chercheurs déclenchent une Perversion, une entité intelligente maligne qui va rapidement chercher à soumettre et détruire toute civilisation et toute forme de vie.

Deux enfants parviennent malgré tout à s’échapper avec le seul remède capable de détruire la Perversion. Après un court voyage, ils atterrissent en catastrophe sur une planète habitée par un civilisation primitive de forme canine, à un stade d’évolution équivalent de notre moyen-age. Le vaisseau envoie alors automatiquement un signal de détresse auquel une civilisation répond, des années plus tard, par une mission de sauvetage.

Quelques réflexions:

Dans Un Feu Sur L’abime, Vernor Vinge développe plusieurs concepts majeurs extrêmement pertinents, notamment:

  • La galaxie non-homogène et la transcendance: plus on se rapproche de son centre, plus la matière est dense et le temps, l’intelligence, la pensée et les avancées technologiques sont ralentis. Les civilisation pour progresser doivent être le plus possible à la bordure de la galaxie, c’est la bordure qui devient le véritable centre des échanges et des avancées technologiques: intelligence artificielle, antigravitation… Lorsqu’elle s’éloigne encore de la galaxie, la civilisation tend à se déifier, à transcender pour devenir des entités « divines ».
  • La race canine intelligente occupant la planète ou atterrissent les enfants fonctionne avec des esprits de groupe: les individus peuvent s’unir et développer un esprit commun, un individu est alors constitué de plusieurs corps indépendants avec un esprit unique, fusion des différents esprits. Lors du décès d’un des membres de l’individu, celui-ci doit s’efforcer de maintenir son unité, et généralement va chercher un corps solitaire pour lui proposer la fusion, cette fusion est source d’équilibre jusqu’à une certaine limite (<3,4 voire une dizaine de corps, selon les individus).

Vernor Vinge a reçu pour Un Feu Sur L’Abîme l’éminent prix Hugo en 1993.

Avis personnel:

Assez difficile d’accès et très conceptuel, ce roman recèle des reflexions d’une extrème richesse (en effet plusieurs années avant leur arrivée, Vernor Vinge décrit notamment ce qui sera Internet, le mail etc.)  et une histoire qui se révèle passionnante malgré un départ un peu rude. Accrochez-vous, ça vaut le coup.

[Lien vers une critique de haut vol]

Le cycle d’Ender, le chef d’oeuvre d’Orson Scott Card

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Couronnement inédit dans le monde de la science-fiction, Orson Scott Card, mormon de son état, a reçu les prix Hugo et Nebula deux années consécutives au titre du cycle d’Ender: en 1985 pour  le premier volume, la stratégie Ender et en 1986 pour le deuxième, la voix des morts. Le cycle d’Ender comprend 4 volumes, les deux suivants étant: Xenocide et les enfants de l’esprit.

Le cycle est excellent dans son intégralité mais j’insisterai plus particulièrement sur le premier volume: la stratégie Ender, que j’estime être un chef d’oeuvre d’une portée qui dépasse largement l’univers de la science fiction.

Lorsque l’humanité rencontra une race extra-terrestre, les doryphores, celle-ci cherchait à envahir la Terre. L’invasion fut repoussée de justesse grâce à un général de génie disparu peu de temps après. Aujourd’hui la Terre est suffisamment remise pour pouvoir contre-attaquer et prévenir une nouvelle invasion. Dans cette optique, les forces de Défense sélectionnent dès le plus jeune age les enfants des plus grands génies et les éduquent pour en faire des officiers d’élites.  Ender est un génie de 6 ans, troisième et « dernier » enfant de sa famille, il fait parti des enfants sélectionnés par les recruteurs de la Défense. La stratégie Ender est un roman initiatique où Ender va avoir a affronter tour à tour, la séparation d’avec sa famille, l’isolement, l’intimidation, le commandement, la guerre.

La qualité de ce roman, relativement court, tient en grande partie aux à la finesse d’analyse et à la richesse des relations entre les différents personnages. Citons par exemple l’intelligence du traitement et la complexité de la confrontation entre Ender et Graff son instructeur désabusé manipulateur mais fasciné, voire apeuré, par l’intelligence du garçon, ou encore la finesse de l’étude des relations entre Ender, isolé psychologiquement par les agissements de Graff, et les autres enfants de l’école. De l’aveu même de l’auteur, ces relations s’inspirent en grande partie de ses propres souvenirs d’enfance dans des écoles religieuses de garçons (mormones ?). Sous certains aspects, on observe aussi une similarité avec les modes d’éducation jésuites.

Les combats entre les équipes d’enfants à l’école de guerre sont également décrits avec un grand réalisme et une intelligence stratégique remarquable, ce qui rythme aimablement l’ensemble du roman.

Anecdote pour briller en société: aux États-Unis, plusieurs écoles d’officiers militaires ont inclus l’étude du roman dans leurs cours de commandement.

Il est très intéressant de noter par ailleurs que les outils médiatiques que Valentine et Peter, la soeur et le frère d’Ender, utilisent pour manipuler l’opinion publique sont très semblables aux évolutions actuelles des médias de masse, notamment l’émergence des blogs et forums de discussions sur Internet. Le roman ayant été écrit en 1985, cela souligne un talent d’anticipation certain de la part de l’auteur de ce roman d’anticipation (NDLR: et la boucle est bouclée).

Si je devais conclure en 3 mots: à lire absolument !

Henri Troyat, Votre très humble et très obéissant serviteur

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Description Commentée:

Voici un roman intelligent et très bien ficelé à forte connotation historique écrit en 1996 par Lev Aslanovitchy Tarassov (Лев Асланович Тарасо) plus connu en France sous le nom d’Henri Troyat.

Au fil de son récit, l’auteur tisse des liens étroits entre la France, en proie successivement au rayonnement des lumières, à sa révolution puis à la fièvre bonapartiste, et la Russie livrée aux règnes de Catherine II, Paul Ier et Alexandre Ier.

C’est sous l’égide de femmes extravagantes et dominatrices que Constantin Chévezoff, secrétaire à la chancellerie de l’impératrice russe, traverse cette page d’histoire tumultueuse.

Tranchante, vive et sans aucune concession, la plume de ce vieil académicien décédé l’année dernière nous fait vivre de l’intérieur les péripéties amoureuses et professionnelles de ce personnage qui, tour à tour passionné, effrayé ou indifférent se glisse dans des rôles aussi variés que scribe, amant ou confident.

De cette vie consacrée au service de sa Majesté, il ressort un portrait étonnant d’une époque tantôt glorieuse tantôt sordide où la bêtise côtoie l’esprit et où l’idéalisme le plus pur se mêle au sinistre pragmatisme des protagonistes.

À la fin de son roman, Henri Troyat ne cache plus le désarroi et la lassitude de son bon Constantin à qui ils prêtent ces mots terribles :

« En écoutant le récit de ces extravagances, je me félicitais chaque jour un peu plus d’avoir été éloigné du trône. J’étais convaincu à présent que toute politique, qu’elle fut libérale ou despotique, portait en elle les germes de l’injustice, de la corruption et de la folie. Échappé à l’horreur de la Révolution française, j’étais tombé dans l’horreur de la tyrannie russe. Le salut, pour un honnête homme, consistait à se méfier aussi bien des dirigeants illuminés que des foules aveugles. C’était en ne participant ni aux décisions du palais ni aux remous de la plèbe que le sage pouvait espérer survivre en ce siècle de fer. »

Froideval et ses Chroniques de La Lune Noire

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Au centre de l’empire se trouvait…l’oracle. A tous le masque de pierre parlait, mais un seul pouvait voir son vrai visage. Et en ce jour, celui-là était venu….

Au travers des brumes du temps… déjà l’élu s’annonce… Le chien sera du metal le plus pur en lune… Par sa bouche parleront le tonerre et les vents… En lui coulera le feu de la lave ! Sa source sera de jais et de topaze… Sa course sera pareille à l’éclair… Puis son bras soulevera la lune, et les ténèbres se feront marée! Son nom sera légions, guerre, mort et pestilence. Ce qui l’aura précédé s’évanouira dans un tourbillon irrépréssible.

Puis.. rien ! Je ne vois que poussière et néant, le silence des abîmes… Tout est dit, empereur. A présent porte le poids de ton destin et va ! Ainsi de ses voix multiples parla l’oracle devant l’empereur de Lhynn. C’était il y a longtemps, si longtemps que cette prophétie sombra dans l’oubli…

Cette série de bandes-dessinées en 14 tomes nous propose de suivre l’histoire de Wismerhill, un jeune et naïf chevalier semi elfe promis à un avenir héroïque. En effet dès le premier tome, à l’issue d’une longue et terrible lutte, Wismerhill finit par venir à bout de son premier ennemi, un effroyable et innocent lapin, qui meurt muet de stupeur en laissant tomber sa carotte, qui ceci dit en passant ressemble fortement à un point d’exclamation, à moins que ce ne soit le contraire. C’est alors que notre héros rencontre son premier futur disciple, Pile ou Face, qui lui sera toujours fidèle.

Lors d’un pillage enflammé d’un poulailler abandonné, nos deux jeunes protagonistes rencontrent Gorghor Bey, un ogre barbare titanesque sans pitié ni merci qui en mange 10 des comme eux au petit déjeuner. Mais heureusement pour nous, nos héros réussissent finalement à ne pas y laisser trop de plume grâce à l’humour tordant de Pile ou Face. Incorporés à l’armée de Gorghor en marche, ils pillent encore et voient du pays. Les Chroniques de la lune noire sont aussi un roman initiatique, au cours de leurs excursions Wismerhill est déniaisé par Feidreiva son premier amour, qui lui fait voir du pays, encore.

Ce n’est qu’après qu’entre en jeu la Lune Noire et sa terrible magie, et non je ne la raconterai pas cette suite, non vous ne l’aurez qu’en ouvrant les volumes de cette fabuleuse épopée.

Parsemée d’humour décalé, de luttes impériales, de magie, de luxure, de violence sublimée et d’amitié (à vous de remettre tout ça dans l’ordre 😉 cette série est une pépite, les dessins de Ledroit, puis de Pontet sont époustouflants, fins et foisonnants, à la hauteur du scénario et des dialogues de Froideval. La coloration, envoutante, sublime le tout.

Avec les Chroniques de la Lune Noire, vous ne pouvez pas vous tromper !

Philip K.Dick – Le maître du Haut Chateau

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Philip K. Dick - Le Maitre du Haut Chateau

Description :

Le Maître du Haut chateau est une uchronie, il décrit un présent qui aurait pu être si l’Allemagne avait gagné la guerre. Dans cette hypothèse, les Japonais et les Allemands se partagent la domination du monde. Le roman met en scène plusieurs personnages qui ne se rencontrent jamais mais ont tous en commun un lien avec Childan, un des protagonistes. Il est intéressant de noter l’existence d’un roman dans le roman, une uchronie dans l’uchronie intitulé « la sauterelle pèse lourd », un ouvrage séditieux et interdit dans toute la partie sous domination nazie qui décrit ce qu’aurait été le monde si l’Allemagne avait perdu la guerre.

Avis personnel :

Si ce roman n’est pas prenant ni haletant, il développe très subtilement une histoire parallèle, à laquelle on se met à croire progressivement. Le coté psychedelique des romans de Dick est ici très bien représenté et très bien encadré tout à la fois. Intellectuellement passionant, Le Maître du Haut Chateau est un livre est à savourer 🙂